La saveur de l'éphémère - "La persistance de la mémoire" Dali
Derrière des montagnes, le soleil s'enfonce. Les étoiles ne vont pas tarder à apparaître tandis que les derniers oiseaux discutent. Comme hier.
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Coupable de l'altération de nos souvenirs, de leur évaporation même, il nous file entre les doigts. On ne cesse de s'en plaindre parce que l'on a peur. Chaque seconde qui passe est une seconde de moins - quels que soit nos rêves. Il nous rappelle à notre finitude d'être humain.
Et si l'on arrêtait le temps - tragédie de notre condition terrestre ?
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Une fois arrivé à Ithaque, que fait Ulysse ? Après être revenus du toit du monde, que font Hillary et Tenzing ? Rêvent-ils de repartir ?
Avoir un ancrage, c'est rassurant mais n'oublions pas que la plupart du temps, la quiétude a pour compagne la cellule. Ce qu'il faut, c'est un bateau ou bien un camp de base sommaire, pas suffisamment confortable pour y rester longtemps.
Parce qu'à trop vouloir figer le temps, ne risquerions-nous pas de congeler le mouvement ?
Sans lui, où seraient les kilomètres d'encre sur déversés sur le papier ? De quoi tirerions-nous notre inspiration ? Que pourrions-nous faire ?
Où seraient les éclaboussures, les tâches de boue sur le pantalon laissés après une escapade sur les sentiers ?
Paralyser le temps ? Essayer de se souvenir de chaque instant, de chaque détail passé ? Pour quoi faire ?
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Et si, au lieu d'essayer de pétrifier le temps, on acceptait que le bonheur soit éphèmère, que sa quête n'est que bien souvent illusion car il arrive la plupart du temps sans prévenir.
Et si au lieu d'à tout prix s'échapper de la réalité, on accueillait la saveur de l'éphémère ? En s'enfuyant à travers les heureux souvenirs passés tout en espérant y trouver refuge, on n'y déterre guère de joie, guère d'inspiration mais très souvent beaucoup de mélancolie.
En refusant le présent, en se projetant sans cesse dans le futur, on délaisse le seul temps qui existe vraiment, le seul sur lequel nous pouvons avoir de l'emprise. Être heureux, expérimenter et vivre... C'est maintenant !
Sans montre, le temps semble éternel. On vit au rythme du soleil ! Mais ne n'y méprenons pas, les secondes filent tout de même - peut-être un peu plus vite d'ailleurs.
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Derrière des montagnes d'immeubles, le soleil s'enfonce. Les étoiles sont apparues. Les derniers pigeons bagarreurs ont surement trouvé refuge pour la nuit. Comme hier.
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