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Le Duché d'Uzès

 Une nouvelle fois, je n'ai pas respecté le couvre-feu. Piégée dans ma Clio rouge, je comprends bien qu'il est inutile d'appuyer sur le champignon. Je baisse quand-même la radio, état d'urgence oblige.  En arrivant à Uzès, je panique. Vais-je être punie et une amende ? La première de mon existence - euh non la seconde mais ça c'est une autre aventure, une histoire de tram, d'absence de ticket, de contrôleur. En suivant un autre automobiliste, je me rassure. Je ne suis pas la seule à ne pas respecter les mesures gouvernementales établies pour notre soi-disant sécurité qui en réalité, nous enlèvent le semblant de liberté qui nous était accordé jusque-là.  Instinctivement, je tourne à gauche. J'ai beau habiter dans cette ville depuis plus d'un an, je ne sais pas où mène cette rue. Mais à cet instant, je n'ai qu'une seule chose à l'esprit : éviter l'Esplanade. Repère favori des gendarmes en quête d'un peu d'argent à se mettre sous la

Antidote.

Cela fait quelques jours que j'ai retrouvé les fleurs. Celle des cerisiers ont laissé place à de délicieux fruits rouges dont je me délecte avidement. Maman me dit de faire attention quand je grimpe sur les branches. Elles sont fragiles, il ne faut pas les casser sinon l'arbre il crie en silence, il pleure pendant des jours sans qu'on devine sa souffrance.  Cela fait quelques temps déjà que l'école est fermée. Je ne sais pas vraiment pourquoi. Mais bon ce n'est pas si mal. Je n'aimais pas jouer avec les copains. Ils n'étaient pas méchants mais juste quand ils se mettaient tous à parler en même temps, j'avais une impression bizarre - la même qui fait trembler mon corps quand la craie crise sur le tableau vert foncé avant de casser.  Disons simplement que je n'ai jamais vraiment réussi à être comme les copains, à les comprendre. Maman trouve ça chouette, il dit que je ne rentre pas dans le moule, que je suis pleinement moi-même. Mais moi, ça me rend so

We can do it - Rosie the Riveter (Norman Rockwell)

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 Au lieu d'aller faire la guerre, floués par un nationalisme croissant, par une peur grandissante - celle de perdre nos petits privilèges et au passage notre liberté gagnée par le dur labeur consistant à être nés dans un pays parmi les moins horribles - on pourrait refermer le cercle, non ?  Au lieu d'aller combattre un ennemi invisible - une idéologie, un virus - on pourrait être un peu plus égoïste. Sans forcément suivre la masse - cette fameuse doxa dont parlait ma professeure de philosophie avec passion sans pourtant en dissimuler son dégoût - tracer son propre chemin. Celui qui nous attire, celui qui nous effraie parce qu'il ne correspond à aucun préjugé mais aussi parce qu'il n'est approuvé que par quelques marginaux. Bien souvent, nous sommes freinés par les autres. Ce n'est pas de leur faute, c'est nous qui déraillons, qui choisissons la facilité de la boîte à excuses qu'ils nous ouvrent en grand...  * * * "Tu es vraiment sûre ? N'est-ce

Changer le monde - Souvenirs

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Tandis que je culpabilise d'utiliser au quotidien les deux premiers GAFA et ma voiture pour me déplacer, certains fêtent dignement la réouverture des commerces pendant que d'autres continuent d'inutilement se noyer parmi les ventes flash d'Amazon. Tout le monde se prépare (en essayant de sourire malgré les fariboles qui s'enchaînent) à une énième fumisterie américaine. Non non pas le Black Friday mais Noël.  Tous masqués, à un mètre de distance les uns des autres, la fête est plus folle ! Vu que les remontées mécaniques sont fermées, cette année les sages qui restent à la maison seront plus nombreux. Dernière pause pour la planète. Bon, il va bien y avoir ces quelques privilégiés qui prendront l'avion pour aller se faire dorer la pilule sur les plages de l'hémisphère Sud.  Privilégiés, dites-vous ? Et si on inversait la tendance ?  Moi, je n'ai jamais pris l'avion. Et je ne le prendrai jamais. Voyager, d'accord. Proprement, c'est mieux. Et si

Le monde d'avant - Souvenirs

Est-ce l'arrivée soudaine de l'hiver ? Cette impression "qu'on n'a plus de saison" ? Cette privation de liberté qui demeure - même si on nous a rallongé la laisse ?  A quoi est due cette déprime collective ? Celle que l'on entrevoit en dessous du masque. Malgré cette magie de Noël qu'on nous rabâche chaque année, ces vitrines toutes plus décorées les unes que les autres, cette entêtante musique qui inonde les rues et cette injonction au bonheur - à la consommation surtout-, ce monde manque cruellement de joie. La vraie, celle qui fait jaillir avec la même force, inattendue et pure, le bouchon du champagne sur le lustre du salon.  Est-ce que ça a toujours été ainsi ? Ou bien est-ce moi qui brusquement décide d'enlever mes oeillères ? De regarder le monde en face, sans hypocrisie aucune ?  Heureusement que la circonférence du cercle s'est agrandie passant d'un à vingt kilomètres. Je peux ainsi retourner à l'essentiel. * * * Treize ans plu