Coucher de soleil - "Railroad Sunset" Hopper.
Et dans le ciel, le bleu persiste encore, s'accroche avant de disparaître.
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Les couchers de soleil transportent bien souvent avec eux ce brin de nostalgie propre à la fin de la journée à travers des tons nouveaux, différents à chaque fois. Du rouge, de l'orange et même du rose pour les chanceux. Parfois, c'est comme si le ciel annonçait une fin du monde prochaine et ça, elle n'en a pas vraiment envie.
Une vie de bohème, riche de diversités tout comme d'incertitudes mais surtout débordante de passions, d'émotions fortes, incontrôlables la plupart du temps mais qui la rendent incroyablement vivante. Au-delà d'une société qui se sécurise en consommant, elle ose la peur, les doutes profonds. Elle ose désirer Être en refusant Avoir tandis qu'elle accueille à bras ouvert Faire.
Contrairement au lever du grand astre véhiculant une foule d'espoirs, l'endormissement éphémère du soleil nous fait chavirer vers une drôle de vie. Celle des questionnements et des doutes véhiculés par une nature qui se met provisoirement en sommeil. Elle admet avoir une chance inouïe, celle de vivre au rythme du soleil.
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Les montagnes, si chères à ses yeux n'ont pas encore disparu. Dans quelques dizaines de minutes, elle sera lentement arrachée à elles pour un retour à une vie normale, tristement banale. D'ailleurs, ça a déjà commencé, les Ecrins sont dans le rétroviseur, dans la pénombre d'un brouillard tenace. En face, les sommets du Queyras profitent des dernières lueurs du jour.
Parmi les ténèbres ou en face de l'éblouissant soleil, elle a désormais appris à naviguer sans crainte. Désormais elle oscille entre les ombres sans laisser place à l'effroi. Mais quand il fait beau, c'est la panique. Emportée par la foule des émotions, elle se pose d'existentielles questions. La météo sera-t-elle autant clémente demain ?
Mieux vaut tendre vers un futur plus beau, se battre dans l'ombre plutôt que de rester sous les chaleurs rassurantes et soporifiques d'un soleil arrivé par hasard, qu'on n'a pas choisi, pas mérité non plus.
Aux côtés des sommets, le poids du monde s'évapore. Tout est si léger, si pur. Elle ne se pose plus de questions, mis à part les plus essentielles.
Elle ne songe pas à ceux qui pensent pouvoir choisir à notre place ce qui relève du non-essentiel, elle ne songe pas à la distanciation sociale - parce que des humains, il n'y a pas tant que cela au kilomètre carré. Et elle songe encore moins au couvre-feu de 18h.
Elle ne songe plus à la guerre sanitaire, écologique, sociale et sécuritaire.
Elle ne songe plus aux divers états d'urgence.
Après tout, toute sa hâte est dans l'appréciation des plaisirs simples. L'air frais à l'approche des sommets, l'ombre des arbres dans la forêt et même la neige qui tombe des toits. Le chocolat chaud qui réchauffe, les croquemonsieurs échangés dans une nouvelle maison avec un pan d'escalade.
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Elle a pris le risque de dévaler la pente de ski en gardant à l'esprit une phrase prononcée il y a quelques heures et qui résonne déjà comme un mantra : "De toute façon, si tu tombes, tu ne vas pas mourir".
C'est donc si simple, quelques mots, une banale réalité et hop, elle a accepté de décrocher. Elle, la grimpeuse bien souvent habituer à s'agripper, à ne rien lâcher, a laissé la pente l'aspirer. À l'approche du virage, même s'il n'a pas encore appris à tourner, elle a gardé la même vitesse tout en tentant une petite manipulation. Tant pis si ça ne marche pas ! Au pire, on mange de la neige.
De vallées en vallées, de nouvelles découvertes lui sont offertes.
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Un brin d'aventure suffit à raviver la flamme - celle véhiculée par un éternel esprit enfantin. Chaque seconde, la confiance revient - et ça fait du bien. Jour après jour, elle a en elle une force mentale qui ne cesse de grandir - indestructible aurait-elle tendance à dire. Mais avec le temps, elle a appris que ce sont souvent ce que l'on croit être le plus indestructible qui est le plus fragile.
Funambule sur son fil, elle apprend encore et encore à jouer avec les déséquilibres. Ses doutes, ses rêves enracinées ne cessent de la guider tout comme ses envies nouvelles.
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Tandis qu'elle quitte La-Roche-de-Rame, elle n'est pas encore nostalgique, trop préoccupée par l'idée de mettre en place de nouvelles choses qui la rapprocheront de plus en plus vers ses rêves. Elle sait bien qu'elle reviendra dans quelques mois retrouver la saveur des sentiers - qu'ils soient enneigés ou non - ainsi que la lueur des étoiles. Malgré le froid revigorant, elle désire plus que tout vivre au plus proche de la nature - pour ne pas dire, un peu plus loin des êtres humains et du stress ambiant qu'ils dégagent.
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Et si tu la suivais ?
Pas longtemps mais suffisamment pour expérimenter un peu les vibrations apportées par la vie ?
Pour s'échapper un peu ? Un peu de soi et des croyances limitantes ancrées dans notre crâne par une société auto-aliénante ?
Et si toi aussi, tu te mettais à chercher quels sont tes véritables désirs - pas ceux insufflés par les médias, les publicités et les réseaux sociaux ?
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"La seule révolution possible c'est d'essayer de s'améliorer soi-même, en espérant que les autres fassent la même démarche. Le monde ira mieux alors." - Brassens
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