Lettre à moi-même (16 ans)

 Chère Coralie, 

Tu as de l’ambition, bravo. Que c’est beau d’avoir seize ans ! Bon, tu ne t’en rends certainement pas compte parce que tu trouves que tout chiant, lent et monotone. Mais aie confiance, les belles choses vont arriver. 


Je voulais profiter d’avoir une boîte de souvenirs un peu plus remplie que la tienne, sans compter mes neuf années de plus (et donc de quelques expériences supplémentaires), pour t’écrire ces mots. 


Brisons la glace d’entrée : je ne veux pas te donner de leçons. Je sais bien que tu ne souhaites pas en recevoir. Alors histoire de prendre un peu d’avance, voici ce qu’à 25 ans, tu vas (peut-être) regretter. 


Tu mets beaucoup de choses en œuvre pour accomplir tes rêves. Tu n’en parles guère. D’ailleurs, tu ne te rends même pas compte de toute l’énergie que tu déploies au quotidien. Mais je sais que pour toi, c’est la norme. “Celles et ceux qui veulent réussir à tout prix n’agissent-ils pas ainsi ?” as-tu envie, je pense, de me rétorquer. 


Pas vraiment, pourrais-je alors te répondre. Car se dire que l’opiniâtreté (terme que tu apprécies grandement), le dévouement et la détermination mènent à la réussite, c’est grisant. Moi aussi, parfois, je me mets à y croire. Tu as l’impression que tout est possible. Un genre de rêve américain à la française quoi. Mais à vouloir réussir “à tout prix”, il arrive que l’on s’en brûle les ailes. Expression assez banale qui, je te l’assure, arrive plus vite que l’on pense !


Des objectifs, tu en as beaucoup sur ta liste. Et promis, tu vas réussir à les cocher les uns après les autres. Sans trop vouloir te spoiler, ça va prendre du temps, être difficile… Parfois tu vas devoir faire des choix, supprimer des éléments (sans les avoir accomplis) et en rajouter au fil de ton évolution. Un conseil (si je peux me permettre) : suis ton cœur. Tu es en train de te construire. À ton âge, on a tendance à suivre pas mal de monde pour s’ouvrir l’esprit, pour progresser. Mais n’écoute pas n’importe qui. 


Apprends à clouer le bec à ces adultes grincheux qui tenteront de t’inciter à dire “non merci” au sel de la vie. Tu veux vraiment être comme ces gens-là ? Ceux pour qui la légèreté est le seul moyen d’accéder à une cotation supplémentaire ou de monter sur un podium. Alors oui, c’est enivrant. Ça fait du bien à l’égo, ça fait plaisir aux parents. Mais as-tu envie de cela ? Des années de privation pour trois secondes sur une boîte ?  


Autre chose : ose dire à tes exigences de fermer leurs gueules. De temps en temps, ça fait du bien. Ne sois pas esclave de tes ambitions. 


Tes exigences, parlons-en. Abaisse-les un peu, s’il-te-plaît. Ta santé mentale te remerciera. Je sais ce que tu te dis à cet instant : “Ce moi du futur manque cruellement d’ambition”. Mais sans vouloir te vexer, j’ai bien plus de projets que toi. Là, après un léger syndrôme de Peter Pan, je commence à rentrer dans le monde des adultes (parfois à reculons, c’est vrai). J’en comprends mieux les codes mais ce n’est pas toujours facile. Neuf ans plus tard, la même question me brûle les lèvres. “Mais qu’est-ce qu’ils font ces cons ?”.


Je n’en ai toujours pas la réponse. 


Avec du recul, je me dis ce qui doit te guider, c’est la recherche du bonheur. Tu y penses déjà beaucoup. Tu écris, tu dissertes sur le sujet à chacun de tes temps libres. Ça a l’air facile dit comme ça : “le bonheur”. Tu te demandes ce que c’est mais franchement, je suis désolée de t’annoncer que j’en ai pas (encore) de définition claire. À vrai dire, je crois que je lui préfère désormais l’exaltation. Plus intense, plus fugace aussi. 


Si tu ne devais retenir qu’une seule chose de tous ces paragraphes, ce serait de profiter. Profite parce que tu es à un moment où tu fais le plein de souvenirs. 


Voilà, c’est ça l’idée : faire le plein de souvenirs. Le plein de souvenirs, allez s’il-te-plaît, pense à moi, j’en ai besoin. Tu l’écris déjà dans tes carnets : “Kiffe ton moment”. Voilà, c’est qu’il ne faut pas le perdre de vue. Kiffer le moment sans te laisser happer par tes désirs de performance et de productivité. Même si c’est un moyen pour toi de t’échapper du chaos de ce monde. Ce sera pire après. (On a dit pas de spoil !)


Et au fait, n’oublie pas que tout le monde n’a pas envie d’être comme toi. C’est leur choix (pas forcément synonyme de médiocrité, précision bien nécessaire, même si je suis sûre que tu n’en crois pas un mot). 


Alors je sais que ce n’est pas évident à formuler, à accepter pour le moment. Mais ne te pose pas de questions. Tu es à ta place, vraiment. Ne t’enferme pas, c’est tout ce que je te souhaite. Tu vas faire des erreurs, c’est certain. On en fait tous. Mais histoire de te rassurer sur la suite de vie, riche en défis et en rencontre, trois réponses à plus grands questionnements actuels : 


  • Tu arriveras à avoir le six-pack, tout en mangeant des glucides le soir

  • Tu vas monter sur un podium (pas forcément celui que tu crois)

  • Tu n’as pas besoin de gagner pour être une championne



Prends soin de toi,


Coralie (celle de 24 ans et 358 jours)

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